mercredi 13 mai 2009

Vers un changement de paradigme de la représentation nationale?

C’est écrit noir sur blanc dans la Constitution de la Vème république : la souveraineté est réputée Nationale, et non populaire. C’est à dire que les parlementaires représentent la Nation et non la population. A ce titre, ils ne disposent pas de mandats impératifs, et ne sont donc pas liés sur ce point. Vous allez voir, ce préambule est important pour la suite…

La Loi création et internet est passée en seconde lecture à l’Assemblée Nationale sur un vote solennel. C’est à dire que sont comptabilisés et précisés les noms des députés qui ont voté pour, contre ou se sont abstenus, classés par partis. Cette procédure n’a rien de bien exceptionnel et s’est produite à d’autres reprises dans l’histoire de l’hémicycle. Cependant, ce n’est pas sur n’importe quel texte qu’elle a eu lieu. Le projet de loi Création et Internet est l’un des textes les plus polémiques de ces dernières années, et a été extrêmement suivi par de nombreux internautes et citoyens. Les multiples rebondissements du processus législatif de ce texte ont même amené certains médias tels que PCInpact ou Numerama a assurer une couverture hors normes de ce texte législatif avec des comptes rendus de débats parlementaires en quasi temps réel. Numerama a même intitulé avec beaucoup d’humour ses articles Hadopi comme si c’était ceux d’une série télévisée (S201, S202, S203…).

Le texte en question a été suivi bien qu’il ne souffrait d’aucun suspense, et pour cause, il est sorti d’un impératif technique présenté comme tel (création d’un arsenal pour protéger le droit d’auteur et les droits voisins) , à un impératif politique, où la majorité devait voter impérativement le texte pour effacer la paire de gifles reçue après le rejet en première lecture. Copé l’avait d’ailleurs affirmé clairement, le fond du débat, le texte est anecdotique, le texte est devenu une nécessité politique.

Cette phrase en apparence anodine et tout sauf surprenante au regard du gouvernement actuel, est pourtant le déclencheur d’une nouvelle pratique, d’une nouvelle perception de la représentation nationale.

C’est tout d’abord la création d’un site internet se voulant pérenne, www.deputesgodillots.info , qui vise à réaliser un comparatif sur les députés, par le nombre d’interventions en séance, les projets de loi présentés, bref, l’activité parlementaire du député. Site que tout un chacun peut consulter et qui potentiellement, est une source de problèmes pour certains députés, dont les administrés apprécieraient sûrement le je-m’en-foutisme total de certains de leurs représentants.

C’est aussi le mailing : 60 courriels en moyenne ont été reçus par les députés lors des débats sur Hadopi. La relation entre le député et ses administrés traditionnellement perçue à travers la distance de l’hémicycle ou la permanence désertée, est devenue cybernétique : la facilité qu’il y a à s’adresser à son député change radicalement la notion de distanciation initialement mise en avant. Les citoyens n’hésitent plus à contacter leur député, même si l’affaire Bourreau-Guggenheim fait l’effet d’une douche glaciale. Cela dit cette affaire au lieu de refréner les ardeurs communicatives des internautes, a fait fleurir une dernière neo-pratique peut être la plus importante : l’internaute ayant été dénoncé par un député, les internautes se mettent à dénoncer leurs députés.

On voit ainsi fleurir ces derniers jours de multiples sites qui reprennent et recensent l’ensemble des votes par député: , , ou bien , et encore là.... (non vous ne rêvez pas, même le Point et le Figaro l'ont fait). On peut ainsi savoir si son député est en faveur ou non de cette loi,et avec le site députésgodillots évoqué précédemment, si il a réellement suivi les débats, si il est intervenu durant ces derniers et quelle fut sa position dessus.

Ainsi, la loi Hadopi avant même sa promulgation, a déjà produit son premier effet : le flicage des députés. Chaque acte de ces derniers, chaque prise de parole en public, chaque intervention, chaque geste est surveillée à la loupe, par une multitude d’anonymes.

Allons nous vers un mandat impératif de fait ? la question risque de se poser si cette pratique se généralise à l’avenir. On peut ainsi penser que pour les prochaines élections législatives, les citoyens auront à leur disposition, l’ensemble du travail parlementaire de leur député, et ce de manière factuelle. Cela laisse présager de nouvelles relations entre le député et le citoyen. Le vote final de ce dernier ne reposera plus uniquement sur de belles paroles électorales mais sur une confiance, sur un passé, une expérience, des actes factuels.

1984 de George Orwell est plus que jamais d’actualité, mais ce sont les députés qui en sont les premières victimes.

mardi 12 mai 2009

La Longue Marche des députés vers la Chine.fr

Aujourd’hui, les députés de l’Assemblée Nationale ont voté une monstruosité dont la plupart n’ont même pas idée. Ils l’ont d’ailleurs dit eux même : Jean François Copé a ainsi précisé que le texte était anecdotique, et que le vote importait avant tout pour des motifs politiques, histoire d’effacer la gifle reçue par le rejet de la loi en première lecture. Consigne a ainsi été donnée par Nicolas Premier, de faire une démonstration de force en incitant fortement (litote) les députés UMP à voter pour ce projet de loi…

Un seul amendement a été accepté par la majorité celui qui visait à exclure du champ de cette loi la notion de correspondance privée , donc les emails. Sans cela l'HADOPI instituée aurait pu fouiller dans les email. Oui vous m'avez bien lu, lire les emails, votre propre correspondance privée. Sachant bien sur, que le Sénat ou la Commission Mixte Paritaire peut encore le rajouter…

Peu importe donc que ce projet de loi permette (merci à l'excellent site PCInpact pour ses comptes rendus et ses synthèses, les points suivants évoqués sont issus de cet excellent site, je me permet de les reprendre car ils forment une synthèse remarquable ):

  • Responsabilité des abonnés sur des box dont ils ne comprennent en rien le mécanisme (voir l'actualité)
  • Mécanisme de sanction qui repose sur l'adresse IP, faible indice facilement piratable
  • Système de monitoring payant et non interopérable que chaque utilisateur devra presque impérativement installer sur sa machine (voir l'actualité), sauf à risquer une procédure kafkaïenne.
  • Culpabilité absolue des internautes naviguant sans ces outils de surveillance et dont l’adresse IP aura été détectée (voir l'actualité)
  • Filtrage (voir l'actualité) et tatouage pour des contrôles en temps réel (voir l'actualité)
  • Contrôle des offres légales commerciales affichées sur un site portail via un système de label (avec risque d'exclusion des offres non labélisées) (voir l'actualité)
  • Surveillance de masse des réseaux P2P, 10 000 emails mitraillés chaque jour, 3000 lettres recommandées envoyées chaque jour et 1000 décisions chaque jour émises par une poignée de personnes qui n’aura pas le temps manifeste d’analyser chaque cas (voir l'actualité) sauf si elle est rapide, très rapide (25,20 secondes par décision)
  • Possibilité de cumul de peines - contrefaçon suspension, réparation civile (voir l'actualité)


>L’ensemble de ces dispositions vise à contrôler le flux des échanges sur internet, en plaçant chaque internaute sous la coupe réglée d’une milice privée en charge de cette surveillance. Ceci est le véritable coup d’envoi de la Longue marche que mène la France, seul Etat au monde à mettre en place le filtrage d’internet (EU, Canada, Italie, Nouvelle Zelande, Grande Bretagne entres autres ont refusé), pour rejoindre la Chine au firmament de la censure.

Le vote solennel de cet après midi est cependant fondamental : il va dresser la carte de l’ensemble des députés qui vont voter en leur âme damnée et inconscience pour cette monstruosité juridique qu’est l’Hadopi.

Deux catégories de députés voteront pour : ceux qui soutiennent ce projet de loi ouvertement, qui l'ont défendu aprement, et dont les noms sont déjà connus :

Mr. Frank Riester

Mr. Frederic Lefebvre

Mr. Roger Karoutchi

Mr. Jean François Copé

Mme. Murielle Marland Militello

Mr. Jean Luc Warsmann,

Mme. Françoise de Panafieu

Mr. Jack Lang

Mr. Gosselin

Mr. Martin Lalande


Mention spéciale à Françoise de Panafieu pour avoir fait passer l'email d'un de ses administrés à a Ministre de la culture qui l'a forwardé à l'entreprise dudit administré, qui a licencié aussi sec la personne à cause de ce mail pourtant protégé par le secret de la correspondance. Dans notre République fondée sur des lois et des libertés fondamentales garanties par les parlementaires et les tribunaux, la violation du secret de la correspondance et le délit d'opinion, ne peuvent que provoquer un sentiment de nausée, de relent des heures vychistes les plus sombres de notre Histoire moderne.

Ces députés entraînent derrière eux tout le reste des députés UMP et quelques Nouveaux Centre qui sont restés silencieux durant les débats, et qui ne connaissent pas le texte en question et sont pour la plupart totalement inconscient du texte qui va être voté. Ils sont appelés les godillots.

Ce soir tout le monde pourra savoir qui a voté quoi, et cela laisse présager quelques craintes de représailles de la part d’un public rendu furieux par le déni de démocratie que constitue cette loi abjecte. On peut se poser la question de savoir si ces godillots méritent le titre de députés, c’est à dire de représentants de la nation, et non de représentants des oligarchies de l’industrie culturelle. C’est pourquoi il est à craindre que leurs noms soient voués aux gémonies si ce n’est à une vindicte populaire autre que simplement électorale. Espérons que les esprits ne s'échaufferont pas et que la raison restera de mise. Répondre à cette violence politique par de la violence physique ou expressive est justement une escalade qu'il ne faut pas entamer.…


D’un autre côté, je salue les députés de tout bord qui ont combattu ce texte sans répis, et tout particulièrement les députés de la majorité qui ont eu le courage malgré les tentatives de les bâillonner, de s’exprimer. On citera tout particulièrement :

Jean Pierre Brard (apparenté PCF)

Martine Billard (Verts)

Patrick Bloche (PS)

Jean Marc Ayrault (PS)

Sandrine Mazetier (PS)

Jean-Yves le Bouillonec (PS)

Didier Mathus (PS)

Patrick Roy (PS)

Maryse Lebranchu (PS)

Jean Dionis du Séjour (NC)

Lionel Tardy (UMP)

Christian Vanneste (UMP)


Ils n'ont eu de cesse de s'exprimer de combattre ce texte malgré les refus de réponses multiples de la part du Ministre et du Rapporteur. Leur volonté de se démarquer, de faire respecter le rôle des assemblées parlementaires , et ce hors de tout partisianisme est le signe que tout n'est pas encore pourri dans notre régime...

Et tous ceux, quelqu’ils soient qui auront le courage de dire “Non au filtrage, non à l’arbitraire d”une justice privée, non à la censure, non à la dénonciation, non à l’obscurantisme » dans l’hémicycle cet après midi. Et tous ceux qui pense que soutenir les artistes passe par d’autres voies, d’autres chemins à explorer, dans un soucis d’apaisement cette fois et on de polémiques abjectes stériles.

Merci à tous ceux là d’avoir mené un combat perdu d’avance devant le « mur » formé par le pseudo « gouvernement », ce dernier apparaissant jour après jours comme une clique d’incompétents à la solde d’intérêts exclusivement privés.

vendredi 10 avril 2009

Lettre ouverte aux députés et sénateurs sur la Loi Création et Internet

Madame, Monsieur le Député, Sénateur,


Je m’appelle Xavier. J’ai 29 ans, et ne suis qu’ illustre inconnu parmi d’autres. Je fais partie de cette génération née à l’aube des années 1980, et qui a appris à lire et écrire avec un papier et un crayon. Quand nous sommes arrivés à l’université, l’Internet n’était pas encore ancré dans les pratiques culturelles : nous y allions pour avoir quelques informations, mais la plupart du temps, nous avions étudié, et travaillé fiévreusement en compulsant des ouvrages faits de papier. Certes, l’informatique était rentré dans les mentalités, mais cela résultait surtout d’une commodité de rédaction ou de présentation de documents. Les échanges, restaient encore matérialisés.

Puis nous, nous sommes adaptés à l’avènement de ce que l’on appelle (à tort à mon avis) le WEB 2.0, qui permet l’interactivité, l’échange, et surtout cette véritable révolution qu’est la dématérialisation. Celle ci est rentrée dans les mœurs à travers une multitude de processus : numérisation des données (on peut scanner des documents et les envoyer en version numérique sans qu’ils perdent de leur réalité) , factures téléphoniques, déclaration des impôts, paiement en ligne, radio en ligne, sessions de multijoueurs, web conférence, télétravail, publicité, accès à la culture (encyclopédies en ligne interactives…). Cette révolution qui par bien des côtés peut paraître anodine, voire puérile, est en train de s’accomplir de manière inarrêtable, et va dans le sens de l’Histoire, et des technologies développées : les échanges vont êtres dématérialisés, voire totalement virtualisés (soi dit en passant, c’est une des grandes difficultés de La Poste entreprise dans laquelle j’ai exercé des responsabilités, qui doit faire face aujourd’hui à la fin de l’écrit au profit du courrier électronique) .

Le déferlement de la société des loisirs suite à la seconde guerre mondiale à permis un déferlement sans précédent de création visuelle ou musicale, qui s’adapta à chaque support censé la supporter : disques vinyles, bandes magnétiques, cassettes audio, disque laser, DVD, et maintenant, Blue Ray. Quelque soit le cas de figure, cette création musicale et visuelle s’est adaptée, malgré les difficultés. Cependant , le support restait avant tout physique, comme le livre de Gutenberg. Aujourd’hui je ne vous apprendrai strictement rien en vous disant que le CD ou le film, et même le livre (des sociétés comme Amazon.fr, et Sony ont lancé un support permettant de stocker plusieurs centaines de milliers de livres) sont dématérialisés et diffusés en ligne. Aujourd’hui l’un des enjeux de la Recherche en Informatique est la virtualisation des clusters et des données pour augmenter les capacités de stockage et de calculs des ordinateurs et serveurs…. Tout cela vient rejoindre le grand cortège de l’ensemble des flux d’informations qui sont eu aussi dématérialisés, au sein de cet immense réseau mondial qu’est Internet. Tenter de réguler, de brider ou de stopper ce phénomène de dématérialisation, c’est aller à l’encontre du sens de l’histoire même, comme tenter d’interdire l’imprimerie de Gutenberg : c’est s’opposer à un mouvement qui est une réalité sociale. L’information n’est plus un stock matériel, elle devient un flux dématérialisé. Là est la Révolution fondamentale.

C’est l’ensemble des connaissances humaines et des échanges qui sont en train de se dématérialiser, qu’ils soient libres de droits, ou non. Dans la première moitié du vingtième siècles, quelques savants ont aperçus les prémices de cette dématérialisation : un biologiste russe, Vernadsky, et un théologien et anthropologue jésuite, Pierre Teilhard de Chardin. Pour eux, le sens de l’Evolution est d’aller vers la création de ce qu’ils appellent une biosphère pour l’un et une noosphère pour l’autre qui représente un état de la conscience partagé par l’ensemble du vivant, et qui passe par une infosphère , immense réseau planétaire, réceptacle des connaissances humaines (Nota : oui j’ai repris le concept de Dan Simmons. mais plus au sens moderne que lui donne le Pr Luciano Floridi en terme de phlosophie de l’information .
Le regretté Professeur Jacques Ruffié, Membre de l’Académie des Sciences, avait dans son ouvrage écrit au début des années 80 « De la Biologie à la Culture » (ouvrage de référence sur la génétique et les Théories de l’Evolution) , analysé l’évolution de l’être humain, comme finalisée au sens biologique ( l’individu interagissant plus avec le groupe social et non avec l’environnement comme pression adaptative) et se portant aujourd’hui sur une évolution culturelle de part sa formidable capacité d’apprentissage, et de création de l’information permise par la société : l’homogénéité l’emporte sur la différenciation. Je renvoie à un intéressant passage ici.

Le sens de l’évolution sociétale, le sens de l’évolution technologique, le sens de l’évolution historique, le sens de l’évolution biologique, tout, absolument tout, porte à cette dématérialisation.

La Loi Création et Internet/HADOPI, bien heureusement rejetée, allait à son encontre en tentant de présenter l’échange d’information (libre de droits ou non) comme criminel ou à tout le moins délictueux. En utilisant les termes (incorrects juridiquement je vous le rappelle) de piratage, ou de vol, cette loi et les personnes qui dans une volonté passéiste et irraisonnée, la défendent, se voilent la face sur la réalité des échanges, et ne comprennent pas la nécessité impérieuse de réguler, faciliter, et encourager les échanges au lieu de les brider. Elle obligeait à référencer, voire filtrer internet, allant encore une fois à l’encontre de sa finalité (qui est de croître comme tout système, ca n’est pas de l’idéologie, mais du bon sens). Les droits des auteurs, compositeurs interprètes et ensemble des artistes lésés (à juste titre) par les téléchargement illégaux ne sont absolument pas protégés par cette loi dépassée technologiquement, comme vous le savez sans doute. Elle ne favorise pas la création, ni une protection des droits et de la rémunération des artistes.

Mais le plus grave selon moi est qu’elle fasse basculer le réseau dans son ensemble dans un sous réseau crypté, secret, difficilement accessible. Plusieurs réseaux tels que Freenet, Tor, les technologies VPN ou Imule font office de contre mesures à l’HADOPI d’ores et déjà, mais restent marginalisés. En les forçant à se développer, HADOPI va générer une réponse avec un internet trouble, paranoïaque ou le plus crypté , celui détenant les « secrets » de la toile, sera perçu comme détenteur de l’information. L’infosphère et donc internet, par une généralisation du cryptage et de la paranoïa sera morte ! Combien d’année de retards allons nous prendre ? combien de générations seront lésées par ce bridage à contre sens, dont le but original, n’est que la protection d’un modèle économique (vente de supports matériels) en coma dépassé ?

Voulons nous retomber au Moyen Age, temps obscurs ou l’information était scellée dans des grimoires tenus à l’écart de la population par les moines copistes détenteurs de ces savoirs ? Ou voulons nous permettre de favoriser l’accès à l’information, le développement de l’infosphère ?

Gutemberg a fait sauter les verrous des incunables, et permis un développement des échanges révolutionnaires dans le monde entier. Il est tant aujourd’hui de faire sauter les verrous des supports physiques et d’assurer massivement le développement des échanges, de l’information, pour accéder à l’infosphère.

Il est temps d’enterrer l’HADOPI et de créer les Etats Généraux du numérique, pour permettre tous ensemble, internautes, créateurs, enseignants, écrivains, de participer à la Génèse d’une Infosphère, de chevaucher les fronts d’onde de l’évolution. Au-delà de tout intérêt, au-delà de tout électoralisme, l’enjeu est bien au-delà de ces courtes vues..

C’est pourquoi j’appelle à rejeter la prochaine lecture de cette loi, et de soutenir des travaux en vue d’une loi pro active, favorisant les échanges d’information, et permettant, et incitant, et encourageant les artistes à y participer.


Je vais conclure par cette citation de cet ouvrage qu’est le Nom de la Rose d’Umberto Eco, vibrant plaidoyer contre le recel de la connaissance :

Stat rosa pristina nomine.

Nomina nuda tenemus



La Rose des ages demeure par son nom.

Il ne nous reste que les mots mis à nus.

mercredi 1 avril 2009

L'exception culturelle française pro-HADOPI, ou comment perdre sa qualité d'artiste...

Hier soir, des « artistes », producteurs, ayants droits, se sont invités dans l’hémicycle pour assister aux débats sur la Loi Création et Internet (fameuse loi appelée HADOPI). Surement les mêmes d’ailleurs qui sont interviewés sur le site jaimelesartistes.fr, ou qui ont donné une grande conférence de presse dans la matinée pour clamer haut et fort, que le téléchargement c’est du vol, que cette loi va les sauver, ou plutôt va sauver leur compte bancaire en Suisse, et que les vilains téléchargeurs sont des criminels voleurs. Leur credo, « Cette loi est pédagogique, ca va diminuer le téléchargement et ils vont massivement consommer des CD ou DVD » . Madame la Ministre Christine Albanel a d’ailleurs salué leur présence dans
l’hémicycle rompant avec la sacro sainte règle de neutralité des débats parlementaires.

Ces esclaves du dieu Consommation oublient un peu vite que leurs prédecesseurs n’avaient jamais autant gagné d’argent qu’eux, et même bien souvent n’ont eu de succès que bien des années après leur mort. Pour la petite histoire et remettre les choses à leur place, un artiste tel que Van Gogh est mort pauvre et méconnu de tous. John Keats, probablement le plus grand poête anglo saxon, est aussi mort dans le dénuement le plus total dans une misérable gargotte à Rome… Est ce pour autant que leur création artistique était amoindrie ? Bien sur que non, l’histoire l’a prouvé.

Ce qui est ainsi révoltant c’est l’équation création artistique= rémunération, comme si tout artiste devrait obligatoirement faire fortune. Rien n’est plus faux car idéologiquement ce serait assimiler le fait artistique comme un métier. Or, on ne devient pas artiste comme on devient électricien, commercial, technicien, ingénieur : on l’est ou l’on ne l’est pas, mais c’est une seconde peau, une essence de l’être. En quoi l’argent est lié à cela ? Ce n’est pas parce qu’un artiste est pauvre qu’il cesse d’être un artiste !

D’ailleurs aujourd’hui sur un CD vendu, ces mêmes créateurs de soupes/navets attachés à la criminalisation des internautes , oublient de dire que leur manque à gagner est de moins de 1 euros, le reste allant à leur maison de disque, producteur… Un musicien, ou interprète ne vit principalement que par ses concerts (qui ne sont PAS téléchargés illégalement) et TRES exceptionnellement (une 15aine en France, guère plus comme Halliday, Cabrel, …) de la vente de CD. Seuls les artistes multimillionnaires (et bien souvent dont les comptes sont dans des paradis fiscaux) ont donc un intérêt à ce que cette loi passe.

Quand aux réalisateurs de films, je n’ai jamais rencontré une hypocrisie pareille, quand on sait que les entrées en salle sont en croissance continue : la fréquentation des Cinémas n’a jamais été aussi importante en France . Que viennent ils faire alors, si ce n’est de la lèche auprès des gouvernants et d’un ministère de la Culture dont ils bénéficient de subvention pharaoniques?

Si ils rampent aux pieds du pouvoir avec une belle langue fourchue, ils manquent en revanche de l’intelligence du serpent (brave bête) : non seulement ils sont laches et veules, mais également méconnaissent totalement les problématiques techniques d’internet (voir articles en parlant) . Forcément vous me direz vu leur Sinistre de tutelle, Madame Albanel.  

Voici la liste de ces personnes, qui acceptent ainsi de voir leur nom accolé à une loi liberticide, qu’Orwell n’aurait pas dénigré, et dont la France est le seul Etat démocratique au monde à la mettre en place (la Nouvelle Zélande, les USA et l’Angleterre ont renoncé) :

Des chanteurs parmi lesquels Etienne Daho, Christophe Maé, Kery James, Sinik, Francis Cabrel, Patrick Bruel, Jean-Jacques Goldman, Jenifer, Stanislas, Raphaël, M Pokora, Keren Ann, Thomas Dutronc, Eddy Mitchell, Isabelle Boulay, Maxime Le Forestier, Martin Solveig, Marc Lavoine, Calogero, Gérard Darmon, Pascal Obispo, Jacob Devarrieux, Elie Seimoun, Alain Bashung, Bernard Lavilliers, Rachid Taha, Bob Sinclar, Psy4delarime, Abd Al Malik, Anis, André Manoukian, Charles Aznavour, Alain Souchon, Mademoiselle K, Soprano, Arthur H, BB Brunes, Liane Foly, Emmanuelle Seigner, Ridan, Renan Luce, Zita Swoon, Johnny Hallyday, Empyr, Kenza Farah, Shine, Camaro, Diam's, Renaud, Romane Cerda, Cali et la Grande Sophie, Thomas Dutronc, Françoise Hardy et Sanseverino, ou des cinéastes, Philippe Lioret, Cédric Klapisch, Guillaume Canet, Agnès Jaoui, Bertrand Tavernier, Costa-Gavras, Jean Becker, Jean-Jacques Beineix, Vera Belmont, Michel Boujenah, Pierre Jolivet, Gérard Jugnot, Georges Lautner, Patrice Leconte, Claude Miller, Jean-Paul Rappeneau, Coline Serreau, Pascal Thomas, Danièle Thompson et Francis Veber

Je n’ai jamais téléchargé (illégalement ou non) leurs œuvres, je ne les ai jamais acheté. Et je peux vous garantir une chose : je ne le ferai pas, et appelle tout ceux qui me liront à ne pas le faire. Tout simplement parce qu’un artiste qui privilégie son compte bancaire à la diffusion de ses création n’est pas un artiste, et ne mérite aucunement de l’être.

Dans un prochain article, je parlerai de tous ceux qui ont choisi de diffuser leurs œuvres, dont l’objectif n’est pas l’argent, mais de savoir qu’ils émerveillent les sens du publics par leurs créations. Ceux là, à mon sens sont des artistes et méritent tous les encouragements possibles.

mercredi 18 février 2009

La Guadeloupe dans la Fournaise

Chaleur…La chaleur est une élévation de température que l’on ressent comme excessive. Sur l’être humain (également sur les animaux : ophidiens, abeilles, mammifères…), elle provoque des troubles de la vision, de l’énervement, une frénésie, qu’on associe souvent à la violence.

La Guadeloupe bout. Elle est rentrée en ébullition, et la nuit dernière on peut dire qu’elle a débordé d’une marmite chauffée à blanc…

Les médias glosent sur les causes souvent liées et justifiées de cette crise : crise économique, prix de biens de première nécessité importés trop élevés, situation monopolistique de certains, chômage très élevé, situation touristique en berne ( concurrence de la République Dominicaine et d’autres îles des Antilles), PIB faible…En soit, ils vivent une crise sociale comme d’autres départements métropolitains. (hormis certains particularismes économiques). Mon propos n’est pas de remettre en cause leurs revendications sur le pouvoir d’achat, sur le fond ils ont raison à 200%, au vu des disparités sociales très marquées, mais sur la forme….on se retrouve dans une situation hallucinante.

La différence est que cette crise est instrumentalisée et passe d’un conflit économique et social reposant sur des faits objectifs , à un conflit subjectivisé par les idéaux indépendantistes et racialistes. Les vieux démons colonialistes ressurgissent, et les leaders de ce mouvement social, Elie Domota en tête, s’inspirent de la sémantique associée pour enflammer les foules. De ce fait, cette lutte s’apparente à une « libération » des « esclaves » créoles des « colonialistes » métropolitains, pour conquérir leur « indépendance ». On sort ainsi de la simple révolte économique et sociale pour s’enfoncer dans un terrain plus trouble ou le moindre élément d’argumentation des forces en présences devient subjectif, et prête à l’inférence. Pour résumer, on craque une allumette dans un dépôt de munitions et on attend de voir ce qui se passe.

Cet embrasement n’est pas que sémantique, et relève de la manipulation de masse, pour ne pas dire de l’agit prop des partis révolutionnaires des années 60-70. Cela sert en effet de justification à la victimisation permanente , et au refus de la moindre négociation. Négocier avec le patronat ? c’est impensable pour le LKP, puisque par définition, ce sont des békés, donc des colonialistes. Négocier ce serait rentrer dans une spirale de dialogue appelant à faire des concessions. Comment concéder quoique ce soit avec des gens que l’on pointe quotidiennement du doigt comme étant des esclavagistes ? La négociation, cède la place à la lutte et la recherche permanente de l’affrontement et de la tension. La preuve, jusqu’à hier il ne restait qu’une revendication sur les 132 du collectif : la revalorisation de 200 euros de sbas salaires. Puis Elie Domota précisa le mercredi 18 février , "aujourd'hui ce n'est pas simplement la signature d'un quelconque protocole sur les salaires qui va régler la situation"…Bref, après cette 132ème, une 133ème, et c’est l’escalade…

Le LKP est rentré dans une spirale infernale dialectique, qui se radicalise de jour en jour, et nécessite de contrôler la population pour éviter une anarchie totale. Les derniers évènements de la nuit passée m’ont fait frémir…des bandes de jeunes soit disant qui n’ont rien à voir avec le LKP (qui n’assume aucune de ses responsabilités de pyromane et a fortiori ses mensonges) qui « cassent » et pillent tout ce qui passe à portée, mais surtout qui tirent avec des fusils à pompe sur les gendarmes (ca on a moins l’habitude)…. Ils n’ont pas d’argent pour les biens de première nécessité mais pour acheter des fusils à pompe ? Ils veulent soit disant négocier et tirent à bout portant sur les forces de l’ordre et sur des pompiers ? Une personne a déjà été tuée par une balle tirée par ces jeunes…A force d’attiser les haines…le bain de sang est jour après jour de plus en plus craint.

La Guadeloupe s’enfonce dans une spirale d’auto combustion, et le point de non retour semble proche ou l’on va basculer d’une lutte économique à une lutte armée, même si pour certains (et je ne les salue pas au passage), les deux vont de pair. Ce bouillonnement révolutionnaire enfiévré par leurs idéologies menace d’ailleurs la métropole. Des hommes politiques comme Bayrou ou Besancenot, ont manifesté bruyamment leur soutien au LKP (pour seuls motifs de se démarquer du gouvernement et du PS), et par là se portent caution de sa rhétorique au risque de vouloir faire basculer la métropole dans le même schéma. Mais le problème pour une fois n’est pas le gouvernement, ni Nicolas Sarkozy (même si Yves Jego a géré l’affaire de manière catastrophique). Il est dans la nécessité impérative du dialogue, dans la volonté commune des parties de s’asseoir autour d’une table, et de dialoguer la tête froide. En refusant d’agir sereinement, comme le font les syndicats traditionnels métropolitains qui la plupart du temps évitent de dépasser les bornes, en jouant l’épreuve de force, le LKP prend une terrible responsabilité d’alimenter le brasier.

La Guadeloupe gémit au milieu des flammes, et appelle à l’aide. Elle demande de la parole, de l’écoute, des soins a ses brûlures, de l’affection qu’elle mérite. Et non pas qu’on intensifie les flammes déjà bien trop vives…sans quoi sur les cendres de sa révolte, les habitants dévôts aux paroles de ce pyromane d’Elie Domota se retrouveront sans aides, sans subventions, sans importations, sans entreprises ni modèle économique viable et structuré. Ils ne pourront que contempler les flammes amères de ce monde rêvé qui était le leur, et non l’absurde manipulations de têtes brûlées.


mardi 3 février 2009

Achille Last Stand

J’adore Led Zeppelin, et tout particulièrement ce morceau extrêmement rythmé et diabolique…. Une ligne de basse infernale, une batterie démoniaque, et un Jimmy Page héroïque à la gratte font de ce morceau une légende du rock.... C’est aussi un symbole, celui de l’excellence, de la virtuosité. Comme celle du joueur de rugby Dan Carter dont le tendon éponyme de la chanson fut fauché en plein vol samedi soir…

On a beaucoup glosé sur les cadences infernales dont il fut victime, sur les pressions économiques, sur le suivi médical, sur la dangerosité de ce sport, je ne reviendrai pas dessus.

Mais on n’a pas encore traité la symbolique de cet acte. Et encore me direz vous, Le pire étant l’avalanche de symboles, voyez plutôt… dans ce match au Stade de France, comme à son habitude , le Stade Français avait multiplié une débauche de spectacles : des danseuses du Pink Paradise, un mini concert d’Emile et Image, des dirigeables chinois, des gens qui retournent des voitures et des pneus…et un spectacle censé représenter L’Illiade et l’Odyssée (pour y avoir été, je comprends pourquoi Homère était aveugle, c’était une bénédiction pour lui)… Le clou du spectacle fut non pas les lazzis vouant au gémonies ce « panem et circense », mais la Tragédie Grecque improvisée dans toute sa splendeur, à la conclusion de ce qui restera un très beau match de rugby.

Du jeu du mouvement au large, des gestes techniques magnifiques, et plus le match durait, plus on admirait la classe absolue de ce joueur d’exception qu’est Dan Carter. Passages de bras, prise d’intervalle, jeu au pied millimétré, passes sur un pas, bref….toute la panoplie artistique de cet Achille Néo Zélandais, qui sublimait ses coéquipeiers qui d'un Maxime Mermoz ou d'un David Marty se sentaient Patrocles.

Tous les commentaires sont d’ailleurs unanimes, il a totalement éclaboussé le match de sa classe jusqu’à étouffer totalement les stars parisiennes que sont Beauxis et Hernandez…Las, le sort fut cruel…Dernière action du match, 80ème minute, histoire d’arracher la victoire, le stratège Catalan voulut relancer des 40 mètres suivi de ses fidèles hoplites…Je ne sais si Apollon ou une des divinités grecques ont guidé les gestes de ces humains bien trop humains, mais le héros, plusieurs fois sacré meilleurs joueur du monde, fut mis à terre, victime d’un choc déchirant son tendon d’Achille au coup de sifflet final. Et pour conclure comme il se doit, le Stade de France entra en éruption par un feu d’artifice…

Cette tragédie sportive au milieu de ce pandémonium délirant doit servir de sonnette d’alarme, d’un coup d’arrêt à ces logiques illogiques, à ces pressions aberrantes ( la précédente jurisprudence Castagnède n’ayant pas servi de leçons) : le rugby est un sport d’hommes, d’êtres humains, qui pour satisfaire l’homo oeconomicus autant que le spectateur lambda, voient de plus en plus leur santé sacrifiée sur l’autel des augures mercantiles et des cadences de galériens de ce sport. Que l’on arrête cette escalade vers un Colisée postmoderne !

J’espère que l’on reverra Dan Carter sur les terrains de rugby, et sous les couleurs de Perpignan. Parce qu’il apporte quelque chose en plus de sa technique éblouissante, de sa classe, de sa vista, de sa gentillesse et de son humilité de tous les instants. De part sa blessure, sa souffrance, et ses larmes, Il nous apporte son humanité au milieu de ce rugby gangrené par le spectacle. Dan Carter nous reviendra, et ce ne sera plus en Achille , mais en Promethée du Rugby.


Renaissance

Cela fait un long moment que ces carnets de voyages n’avaient pas été mis à jour, ni parcourus. Le manque d’envie, l’amertume du passé, et surtout le manque de sens : ca ne servait à rien d’épiloguer sur les multiples déceptions sur ces machine à broyer les hommes que je voulais dénoncer. Ainsi à quoi bon continuer ?

Pour ca que certains articles ont été supprimés et que là j’en rajoute quelques uns d’un coup….

J’ai une nouvelle vie, plus joyeuse, une vrai renaissance. Celle des mentalités ? Des idées ? Peut être aussi… L’époque que nous vivons est chaotique, emportée par une entropie qui a atteint son maximum. Le chaos n’est plus ordonné, plus créateur. On le voit avec ces multiples folies soit destructrices soit sur régulatrices. Mais de temps à autres quelques sourires, quelques regards, appellent des lueurs d’espoirs. Je n’ai aucune prétention à en faire partie , si ce n’est que pour témoigner de l’existence, et de la possibilité que ce chaos ambient, redevienne une soupe primordiale d’ou jailli une lumière de vie...


Bonne lectures à tous!